Essai sur la connoissance des médailles anciennes et modernes
[fol. 1r] Essai sur la connoissance des médailles anciennes et modernes.
à l’abbé Boucher, dr de L. Littre française à l’Université de Cracovie.
Cet ouvrage a été prêté à M. le Cte Sierakowsky, Grand Prévot de la Cathédrale de Cracovie, le 21 avril 1817.
L.B.
[fol. 2r] Essai sur la connoissance des médailles anciennes et modernes.
rédigé pour l’instruction du jeune C. de W.......
J’ai tenu ma parole, Mr, et en vous envoyant les six mémoires de M. le Beau sur les médailles restituées, j’ai rempli les obligations que je m’étoit imposées moi-même, lors de mon dernier séjour chez vous. J’ai fais plus même, j’y ai joins quelques petites observations sur deux médailles grecques antérieures à Séléucus, lesquelles sont d’un genre très semblable ; et sur certaines médailles consulaires qui, sans porter l’empreinte de leur réstitution, peuvent cependant être rangés dans cette classe. Néanmoins votre dernière lettre m’annonce que je n’ai point encore assez fait. Vous prétendez que ces détails ne vous suffisent point dans une carrière aussi pénible, et aussi dangéreuse. Vous croyez avoir besoin des lumières plus étendues, pour bien saisir cet ouvrage supérieurement réfléchi à tous égards, mais peu fait pour des personnes qui commencent : vous poussiez même l’humilité jusqu’à vous mettre de ce nombre ; et vous me demandez de vous initier dans ce sanctuaire respectable. Tranchons le mot ; vous voulez que je commence avec vous par les premiers principes. Je serois tanté de croire que la modestie vous dicte ce langage, mais enfin, puisque vous l’exigez absolument, vous serez satisfait. Je vais vous obéir.
Je ne prendrai point avec vous le ton d’un maître qui enseigne ; car moi-même j’ai besoin de m’instruire. Nous étudierons ensemble, nous nous [fol. 2v] éclairerons mutuelement. Nous remonterons aux sources ; et ce serons Mrs Le Beau,11Les six mémoires de M. Le Beau sur les médailles restituées, se trouvent dans le recueil de l’Académie des Belles Lettres de Paris : tomes XXI, XXII et XXIV. de Jaucourt, Géinor, Ursini, &c, qui seront nos guides. Du reste, je ne m’astreindrai point, dans ce petit écrit, à un ordre aussi suivi, aussi méthodique que celui qu’ont observé dans leurs ouvrages ces sçavans si dignes de leur réputation. Comme ces petits détails n’ont pour objet que notre instruction commune, je vous proposerai mes vues, à mesure qu’elles me viendront, ce sera un entretien, et non point un ouvrage, et si, par hasard, il y manque quelque chose que vous croyez indispensable, j’y suppléerai, de vive voix, durant ces vacances que j’aurai encore l’avantage de passer avec vous.
Introduction.
Contenant une explication succincte des termes, des symboles, et des abréviations les plus généralement employées dans l’art numismatique.
Chaque art a ses manières de s’exprimer qui ne sont qu’à lui ; chaque science a ses termes particuliers. L’art numismatique en a tout comme les autres, peut-être même plus qu’aucun d’eux. Vous ne voulez, il est vrai, devenir ni médalliste, ni antiquaire, et par conséquent, il vous suffit d’avoir une légère idée de cet étude. Cependant, le premier pas qu’il vous faut faire pour cela, c’est d’acquérir la connoissance des termes qui lui sont propres, du moins des principaux, et de vous familiariser avec eux. Jusques-là elle vous paroîtra toujours hérissée de milles épines.
[fol. 3r] Mais l’art numismatique cessera peut-être de se présenter à vos yeux sous les dehors attrayans que vous lui avez prêtés jusqu’ici ; lorsque vous aurez à retenir autant de termes, et des termes si peu en usage dans les conversations ordinaires ; lorsqu’il faudra les avoir, pour ainsi dire, toujours présens à l’esprit, et sçavoir s’en servir au besoin, mais armez-vous de patience ; car je vous en avertis, cette difficulté n’est encore rien, si elle se compare à celle que vous éprouverez lorsqu’il s’agira d’entendre du premier abord, et d’interpréter, comme elles doivent l’être, toutes les figures qui chargent ordinairement les deux côttés des médailles. Comme ces figures sont, pour la plupart, symboliques, il n’est pas toujours aussi facile qu’on pourroit le croire, d’en pénétrer le véritable sens. D’ailleurs l’emblême dont elles empruntent la forme, les rend succeptibles d’une foule d’interprétations qui varient selon le point de vue sous lequel on les considère. Conséquemment, elle donnent presque toujours lieu à des conjectures plus ou moins hazardées, suivant la tournure du génie qui se les permet, elles enfantent même souvent des sistèmes qui, tous inconséquens qu’ils puissent être, vous jettent cependant d’irrésolutions en irrésolutions, en sorte qu’il arrive plus d’une fois que l’explication à laquelle on s’arrête enfin, après avoir bien hésité, est la moins juste, et même la moins satisfaisante. Mais ce n’est pas encore tout pour expliquer ces divers symboles avec toute la clarté et la précision qu’ils sembloient exiger, les anciens monétaires cessent souvent en besoin de commentaires, et quelquefois même de commentaires assez longs. Or, l’emplacement ne la permettoit presque jamais. Bornés à une seule ligne, et d’une assez médiocre étendue, (du moins dans les médailles d’un module ordinaire) il ont été contraints de renfermer dans un seul mot ce qui auroit eu besoin de toute une phrase, ou peut-être plus. Souvent même, faute de place pour écrire ces mots en entier, ils ont dû recourir à des abbréviations, et quelquefois à des simples initiales. Ces deux manières de s’exprimer, quelques laconiques [fol. 3v] qu’elles fussent, étoient alors de tout le monde ; mais à la longue, elles ont jetté la plus grande confusion dans les légendes, surtout lors qu’elles y étoient mal ponctuées, ce qui n’arrive que trop souvent.
Voilà donc trois obstacles à lever, avant de nous mettre en route, de peur qu’ils ne vous y arrêtent à chaque pas. Il faut : 1. vous expliquer les termes qui sont exclusivement propres à l’art numismatique, termes que sans doute la nécessité inventa et que l’usage a conservé. 2o. vous donner une idée des symboles, types, et attribus qui se trouvent gravés sur les deux faces des médailles. 3. vous mettre au fait des abbrévaitions qu’est contraint d’y employer.
Cette espèce de digression vous paroîtra peut-être déplacée ; peut-être regretterez vous le tems que vous aurez mis à la parcourir ; cependant cette lecture ne vous sera rien moins qu’inutile. Sans cela vous tireriez peu de parti du petit écrit que je vous envoie, et vous en tireriez moins encore des explications que j’ai été souvent forcé de joindre aux médailles de Lazius, que je vous ai dessinées le mois passé ; quoique, pourtant, dans l’un comme dans l’autre, j’aye évité, autant qu’il m’a été possible, tous les termes techniques qui semblent annoncer le sçavoir et qui souvent ne sont qu’un masque ingénieux sous lequel on cache son ignorace.
S A
Explication des termes les plus généralement employés dans l’art numismatique.
Âme. On donne ce nom à la légende qui, le plus ordinairement, forme une ligne circulaire autour des médailles, tant de l’un que de l’autre côté. C’est par cette raison qu’on appelle inanimées toutes les médailles qui se trouvent sans légende, parce qu’effectivement elles ressamblent sans vie et sans [fol. 4r] a[c]tion, desquelles sont privées de ce qui seul peut rendre intelligibles, les divers attributs quelles présentent, ou les symboles qui en font le principal ornement.
Attribut. On désigne sous ce nom général toutes les emblêmes qui accompagnent les figures de divinités, ou d’hommes, et qui servent à désigner quelques unes de leurs propriétés fixes, ou momentanées de ces attributs. Les uns sont exclusivement propres aux dieux ou à l’homme auquel ils se donnent. Tel est le trident qui ne convient qu’à Neptune. Les autres sont communs à plusieurs individus. Ainsi, la haste ou la férule devient la marque du pouvoir dans la main des souverains, comme dans celle des dieux.
Buste. C’est une figure ordinairement gravée jusqu’à mi-corps, quoiqu’il n’y ait point de règles fixes qui en déterminent précisement l’élévation.
Si on n’apperçoit que le tronc, sans bras, et presque terminé en pointe, les figures prennent alors le nom de thermes, qui chez les anciens étoient regardés comme les divinités protectrices des frontières, mais si les bras paroissent en entier, on y joint assez communemment quelque symbole, comme un sceptre, pour désigner l’autorité supérieure; une ancre pour indiquer les forces navales ; un foudre pour annoncer la terreur qu’a répandu un guerrier victorieux ; une tête de cheval dont les rènes sont passées dans des mains de la figure, pour représenter une expédition militaire, ou une course des chevaux, ou une victoire remportée dans le cirque, &c.
Champ. On appelle ainsi le cotté d’une médaille, qui est, ou tout à fait vuide, ou qui n’est chargé que d’une contremarque de quelques lettres initiales, ou d’un chiffre qui le plus ordinairement sert à désigner la valeur de la pièce.
Coin. C’est le carré sur lequel on frappe les médailles, et qui diffère ordinairement selon les villes où les médailles s’impriment, et suivant les empereurs ou les rois dont le nom se trouve annoncé, dans leurs lédendes.
[fol. 4v] Il est bien d’observer qu’il y a pour chaque médaille, ou monnoie, une matrice primitive, d’après laquelle se frappent tous les carrés, et qu’ainsi c’est commettre une erreur grossière que de confondre le carré avec la matrice ; ce qu’ont fait pourtant plusieurs écrivains très éclairés d’ailleurs.
On appelle aussi coin une marque distinctive mais arbitraire qui se grave sur chaque pièce de monnoie, et qui en devient comme le signe caractéristique. C’est ainsi que les Français distinguent leurs divers hôtels de monnoies, par une des lettres de l’alphabet, laquelle se grave ordinairement au dessous de l’effigie du prince. On trouve des marques semblables sur presque toutes les anciennes médailles, principalement sur celles de Rome et de la Grèce. Quelquefois c’est une lettre, quelquefois c’est un chiffre ; souvent un caractère de fantaisie qui n’offre aucune expression.
Contremarque. Quelques auteurs la confondent avec le coin ; cependant elle en diffère essentiellement. Voici les principaux caractères auquels on peut les distinguer :
1.o La contremarque pouvoit rester la même sous plusieurs souverains, quelques unes mêmes se sont maintenues à Rome durant plusieurs siècles ; telles sont celles qui portoient D. D. D. (Datum Decreto Decurionis), A. F. P. (Actum Fide Publicâ), S. P. Q. R. (Senatu Populoque Romano), S. C. (Senatus Consulto), &c.
Le coin au contraire changeoit constament avec le monarque qui lui avoit donné cours.
2.o On employoit souvent divers contremarques sous le règne du même prince et sur les mêmes espèces des médailles ; tandis que le coin restoit constamment le même jusqu’à la mort du souverain qui l’avoit muni de son autorité, et ne pouvoit varier qu’autant que les monnoies étoient d’un métal différent (car chaque métal avoit son coin particulier).
3.o La contremarque renfermoit souvent une figure entière, en quelque symbole, quelquefois des caractères entrelacés ; d’autres fois des lettres séparées par des ponts (telles surtout que celles que j’ai déjà citées) ; le coin au [fol. 5r] contraire ne présentoit ordinairement qu’une seule lettre ou un chiffre unique.
4.o On trouve jusqu’à deux, trois, et souvent même quatre contremarques sur la même médaille (lesquelles probablement y ont été imprimées dans divers tems, et pour des raisons qui ne nous sont point connues) ; tandis que le coin est unique sur toutes les médailles et dans tous les métaux.
5.o La contremarque, chez les Romains surtout, n’avoit lieu que sur le bronze ; et le coin se gravoit même sur l’or.
6.o La contremarque n’a été en usage à Rome que depuis Aguste jusqu’à Trayan, et pour la seconde fois, depuis Justin jusq’à Phocas ; tandis que le coin autorisé par les loix, dès les premiers siècles de la République, a continué d’y être en usage sous tous les consuls, et tous les empereurs sans aucune interruption. Il est vrais que la contremarque paroît avoir été employée plus longtems et plus généralement dans la Grèce qu’à Rome. Cependant, il est plus que probable qu’elle n’y a jamais été d’un usage aussi constant que le coin ; car celui-ci se voit sur toutes les médailles, sans distinction de métal, ni de grandeur ; et on ne peut pas, à beaucoup près, en dire autant de l’autre.
Corps. Nous avons vu plus haut que l’on donne ce nom aux figures simples ou emblématiques qui chargent les deux côttés des médailles, tandis qu’au contraire, on appelle âme la légende qui explique les propriétés de ces figures, et les attributs qu’on leur prête.
Exergue. Caractères gravés sur l’un ou sur l’autre côté des médailles (mais plus ordinairement sur les revers), au bas des figures qui les chargent, et qui, ainsi que les monogrames, désignent ou le prix de la monoie sur laquelle ils se trouvent, ou le nom du prince qui l’a fait battre, ou quelqu’époque particulière.
Inscription. On appelle ainsi tous les caractères qui se trouvent gravés sur le revers d’une médaille, au lieu de symboles, et qui ont trait à la figure représentée sur le côtté opposé, ces caractères forment quelquefois des mots entiers, mais le plus [fol. 5v] souvent ce sont des abbréviations, ou des simples chiffres, mais qui remplissent tout le champ.
Légende. C’est la ligne circulaire qui borde, en quelque sorte, la médaille des deux côttés, et qui est formée ou des mots entiers, ou d’abbréviations, ou d’initiales, et souvent de tous les emblèmes qui remplissent le milieu du champ. Chaque médaille en a ordinairement deux, celle de la tête et celle du revers. L’une indique les noms, les pronoms, les dignités, les charges &c. de la personne représentée sur cette première face ; l’autre rappelle ses vertus, ses qualités, ses grandes actions, ou les monumens qui on éternisé sa gloire. Quelquefois les noms, prénoms et dignités occupent, par moitié, les deux légendes ; d’autre fois (mais beaucoup plus rarement) ils ne se trouvent que sur le revers ; enfin, sur quelques médailles, on les trouve répétés, sans presqu’aucun changement des deux cottés.
La position naturelle de la légende, et qui même la distingue de l’inscription, et de l’exergue, c’est d’être gravée en ligne circulaire autour de la médaille, sur chacune de ses faces, et de gauche à droite. Il est vrai que, dans les médailles grecques surtout, on trouve parfois des légendes posées de droite à gauche, à la manière des Hébreux (ce qui aussi a donné souvent lieu à des fausses interprétations), mais ce n’est pas le plus grand nombre. Cependant, cette position qui nous paroît si naturelle, et qui est si généralement observé de nos jours, ne l’a pas toujours été de même chez les anciens peuples. Dans les médailles des premiers siècles de Rome, la légende tient souvent la place que l’exergue occupe dans les nôtres. Quelquefois elle présente deux lignes horisontales, l’une au dessus de la tête, l’autre au dessous, il s’en trouve aussi qui forment des lignes transversales, et comme en sautoir, d’autres sont en pal, quelques unes en baudrier ; enfin, il en est qui se terminent dans une seule ligne, laquelle traverse la face de la médaille sur un plan horizontal, et se trouve coupé par la figure.
[fol. 6r] Quoique les médailles doivent toujours avoir deux légendes, il s’en trouve pourtant qui n’en ont qu’une, sur l’une ou l’autre face. Il y en a même qui n’en ont point du tout, c’est ce qu’on appelle médailles inanimées ; enfin, il en est qui, au contraire, offrent une légende dépouillée de tête et de symbole. Ces sortes des médailles doivent se ranger parmi les incertaines.
Médaille. ....... Voyez en la discreption, dans le chapitre second ; page 3* ; ainsi que dans la notte qui y est jointe, et qui a pour objet de démontrer que toutes les pièces gravées jadis par les Romains et les autres peuples de l’antiquité, ne sont pas toutes de simples monnoies, et que d’ailleurs même, quand elles en seroient, leur antiquité sont les faire ranger parmi les médailles, d’autant qu’elles ne sont plus aujourd’hui que de simples objets de curiosité, propres à orner le cabinet des curieux.
Module. Grandeur déterminée après laquelle on range les médailles dans telle ou telle classe. Cette proportion s’observe surtout pour le bronze, que l’on a, d’après ce principe, partagé en grand, petit et moyen, suivant les divers dimentions des médailles frappées sur ce métal.
Monograme. Lettres initiales, chiffres, ou autres caractères, soit unis ensemble, soit entrelacées, lesquels forment, ou sur la tête, ou sur le revers, comme une petite empreinte séparée de celle de la médaille ; ils sont ordinairement frappés en creux, tandis que la figure est en relief, et ils occupent plus communement sur les côttés l’espace vuide qui se trouve entre cette figure et la légende. Leur objet, du moin celui que nous leur supposons, est de désigner la valeur de la monnoie sur laquelle ils se trouvent, ou le nom du prince dont elle porte l’effigie, ou l’époque à laquelle elle a commencé à avoir cours ; ou enfin telle autre circonstance semblable. Quelques écrivains distinguent le monograme de la contremarque, qu’ils prétendent n’avoir été frappée qu’après coup, tandis que le monograme a été imprimé en même tems que la médaille, mais pour bien établir cette distinction, il faudroit avoir des preuves décisives, et l’on a à peine des foibles conjectures.
[fol. 6v] Nimbe. Espèce de cercle rayonnant qui est gravée sur certaines médailles, pricipalement sur les médailles votives. Ils ressemblent assez aux rayons lumineux que dans le christianisme, les peintres, ainsi que les sculpteurs tracent autour de la tête des saints qu’ils représentent, il paroît que jadis la flatterie en faisoit pour les empereurs et les rois, le même usage que l’équité en fait aujourd’hui pour ceux, qui, par leurs vertus sublimes, ont mérité de nous servir de modèles, et de guide dans le chemin du salut.
Ordre. C’est l’arrangement méthodique d’après lequel on classe les médailles, pour en former des suites raisonnées et relatives à l’objet qu’elles représentent. Ainsi, par exemple, toutes les médailles romaines, rammenées à ce principe, peuvent se partager en six classes. Dans la première, on place celle des déités ; dans la seconde, celle des rois ; dans la troisième, celle des consuls ; dans la quatrième, celle des empereurs ; dans la cinquième, celle des colomnies ; dans la sixième, celle des villes. Voyez l’article suite.
Panthées. Têtes chargées de divers ornemens, la plupart symboliques, lesquels conviennent à plusieurs sujets différens.
Parazonium. Sceptre, haste, férule, ou petit poignard que l’on met à la main d’une figure représentée en entier, ou simplement à mi-corps, et qu’elle tient, tantôt appuyé contre elle, tantôt élevé en l’air. Cet emblème est celui du pouvoir, il ne se donne qu’aux dieux et aux monarques, on le trouve pourtant sur les médailles de plusieurs reines et de quelques impératrices.
Quinaire. On donne plus volontiers ce nom aux médailles qui sont au dessous du module ordinaire. Nous en avons peu de cette espèce, et d’ailleurs elles ne se trouvent que dans le petit bronze.
Relief. Jet, jaille, élévation plus ou moins bien annoncée des figures qui sont gravées en bosse sur le champ des médailles. L’énergie du relief sert presqu’autant [fol. 7r] et souvent plus que la grandeur même des médailles, à les faire ranger dans l’une ou l’autre de trois classes du bronze antique.
Revers. Côté de la médaille opposé à la tête. Il est ordinairement chargé de figures symboliques qui ont quelques traits de convenance avec la personne dont l’empreinte se voit de l’autre côtté. Il s’en trouvent pourtant aussi qui n’offrent qu’un champ tout-à-fait vuide, d’autres ne présentent qu’une inscription, ou une contremarque, quelques unes enfin portent ainsi que la première face, ou une tête ou un buste, ou une figure entière. Il en est même qui réussissent plusieurs figures, telles sont surtout les allocutions ; les médailles de ces deux dernières espèces sont les plus rares, et les plus estimées.
Les premières médailles ou monnoies romains ont été sans revers, et même sans aucune espèce de marque, ni sur l’un ni sur l’autre côtté. Servius Tullius fit le premier gravés sur de petites pièces de cuivre assez mal arrondies, la figure d’un taureau ou d’un bélier ; ce qui suivant quelques antiquaires, les fit appeller pecunia a pecude par la suite on y plaça la tête de Rome casquée, ou celles de Castor et de Pollux, ou une victoire conduisant un bige ou un quadrige, ce qui fit donner à ces sortes des monnoies, l’épithète de victoriatie, bigatie, quadrigatie, &c., mais toutes ces figures ne se gravoient que sur le côtté de la tête, et le revers démeuroit toujours vuide. Ce ne fut que quelques siècles après, que les monétaires et les duumvirs des colomnies imaginèrent d’y graver d’abort des inscriptions, et ensuite des figures symboliques. Les monnoies étant en quelque sorte devenus des monumens de leur orgeil ; un seul côtté ne suffit bientôt plus pour contenir tout l’appareil fastueux dont ils tâchoient de rehausser leur charge assez médiocre dans son origine. Alors la première face fut uniquement consacré à indiquer leurs noms, leurs prénoms, leurs dignités, &c. La seconde présentoit divers emblêmes qui peignoient leurs actions les plus glorieuses ; et ils ne manquoient pas de bien expliquer ces symboles, qui souvent n’étoient que trop significatifs, à l’aide d’une seconde légende, ou d’un exergue, ou quelquefois de tous les deux ensemble. C’est à cette époque que les revers commencent à devenir intéressans, car comme ils sont [fol. 7v] presque toujours chargés de monumens publics, de triomphes et des attributs propres aux divers magistratures ; ils nous instruisent d’une foule des petits détails que l’histoire, même la plus exacte, passe souvent sous silence. D’ailleurs, nous y trouvons une suite assez complette de tous les édiles monétaires, ainsi que des duumvirs et triumvirs des colomnies.
Souvent aussi les revers portent des animaux, ce qui annonce ou des légions (dont chacune se distinguoit par un animal différent) ou les jeux séculaires, ou quelques autres jeux particuliers, célébrés à l’occasion d’une victoire, ou de quelqu’autre événement, dans ce cas on y joignoit un chiffre qui indiquoit le jour où ces animaux avoient été présentés dans le cirque. Il faut pourtant excepter les oiseaux qui étoient les attributs de certaines divinités, ou qui désignoient des apothéoses, dans le Haut Empire, les noms des villes se trouvent en entier sur les revers, et en légende ou en inscription ; mais dans le Bas Empire, ils sont en exergue, et presque toujours par abbréviations.
Quant à certains signes en cercles, en croix, en sautoir, ou tel autres semblables qui se trouvent souvent, en forme de contremarques, sur le revers ; ce sont probablement des marques particulières qui servoient à distinguer les différentes fabriques de moinnoies et les lieux où elles se frapoient. Comme ce sont des signes de convention, ce seroit perdre son tems, que de chercher à les interpréter.
Suite. Ce terme se prend presque dans le même sens que celui d’ordre. C’est une collection de médailles, faite d’après un système méthodique, et dans laquelle on a égard, ou à la grandeur et au relief, ou aux têtes, ou enfin aux revers des pièces qu’on y range.
Parmi les écrivains qui ont proposé des nouvelles vues pour l’arrangement des suites, on en distingues surtout quatre qui ont joué d’une plus grande célébrité.
Je ferai un mot de leur sistème, et je renvoye pour le reste à l’article suite.
Occo et Mezzabarba. Attachés au même principe, forment toute leur suite par les revers, mais au lieu de les ranger, comme les autres, d’après le règne des empereurs, auxquels ils appartiennent, ils se sont exclusivement fixés [fol. 8r] aux époques qu’indiquent les consulats, et les puissances tribunitiennes ; cette méthode est sçavante, elle paroît même assez naturelle, mais elle est presqu’impossible à exécuter, si on veut l’accorder parfaitement avec la chronologie. En effet, nous sçavons que même dans le Haut Empire, les médailles n’annoncent pas toujours exactement les puissances tribunitiennes à plus forte raison ces consulats, pour le Bas Empire, ces époques y sont très rares. Cependant, on les trouve encore, par intervales, jusqu’à Constantin le jeune, mais depuis lui, elles nous abandonnent tout à fait.
Orselius adopta un sistème d’un genre tout à fait nouveau, et qui devint piquant par sa singularité, mais par malheur, en voulant éviter l’inconvenient dans lequel étoient tombé Occo et Mezza Barba, il donna dans un excès qui peut-être n’étoit pas moins dangereux. Ce fut d’anoncer comme des événemens publics, et qui avoient fait époque, des faits particuliers que l’histoire avoit sans doute omis à dessein d’ailleurs, il hazarde beaucoup, substitue souvent la conjecture à la réalité, et donne plus d’une fois un propre goût, pour le goût général, quoiqu’il en soit, voici son plan.
Il ne s’arrête ni aux règnes des empereurs, ni aux consulats, ni aux puissances tribunitiennes, ni aux sacerdoces. Il choisit dans l’ancienne histoire, un certain nombre d’objets qu’il croit les plus dignes de la curiosité des gens instruits, et il y rapporte tous les revers qu’il chasse d’après cet ordre. Sa première suite est purement géographique, elle occupe huit planches, et renferme tout ce qui peut avoir trait aux royaumes, aux provinces, aux villes, aux rivières, fleuves, montagnes, &c. Les deux planches suivantes contiennent les déités du premier ordre, de l’un et de l’autre sexe, ainsi que les vertus qui sont comme les divinités du second rang ; il a ensuite rassemblé dans quatre planches tous les monumens publics institués au sein de la paix, ou pour la célébrer ; tels sont les bâtimens les plus magnifiques, les théâtres, les cirques, les colomnes, les statues, les ponts, &c. Il y joint tout ce qui peut immortaliser la libéralité ou la magnificence des souverains, comme les congiaires, l’entretient des routes, l’établissement des colonnies, les divers magistratures, les sacerdoces, les mariages les plus illustres, les réceptions d’empereurs, des rois, d’ambassadeurs, et de généraux dans les provinces &c.
[fol. 8v] Les quatre planches qui suivent, offrent comme par opposition, tous les monumens qui se rapportent à la guerre ; telles que les allocutions, les campemens, les combats, les victoires, les triomphes, les trophées, les armes, &c. Ce qui a trait à la religion, n’occupe qu’une seule planche, on y voit tous les attributs du sacerdoce, les ornemens des souverains pontifes, des prêtres, des augures, des instrumens employés dans les sacrifices, les libations, les autels et les bûchers. Enfin, la dernière planche représente les apothéoses des princes et des princesses, et les désigne par des paons, des aigles, des figures ailées, des chars tirés par éléphans, des chevaux ou des mules, des temples, et des bûchers.
Le père Bandieri qui a formé aussi des suites, et même de très considérables, par les revers, a suivi une marche bien plus facile, mais aussi bien plus deffectueuse, et moins utile. La seule règle à laquelle il se soit astreint, dans la disposition de ses médailles, c’est l’ordre alphabétique des légendes que portent les revers ; méthode qui ne peut jamais s’accorder avec la chronologie, à moins qu’on ne formât une suite différente pour chaque empereur ; encore même ne s’en rapprocheroit-elle pas entièrement, pour moi, le principe que je croirois le plus vrai, et le plus constamment pratiquable, ce seroit de suivre d’abord l’ordre des années dans les médailles qui appartiennent à chaque règne (ordre qui est facile à observer surtout dans le Haut Empire, et dans toutes les monnoies grecques, puisque ces années y sont toujours marquées sur les légendes) et de combiner ensuite entr’eux les revers, autant que les permettroit cet ordre chronologique auquel ils doivent être subordonnés.
Symbole. On donne assez généralement ce nom à toutes les figures qui chargent les champs des médailles, mais à le prendre à la rigueur, il ne convient qu’à celles qui sont allégoriques, et dont l’emblême offre un sens relatif à la divinité, ou au monarque peint sur la médaille, ou même à l’événement dont il y est fait mention (voyez plus bas, le paragraphe trois, sur les symboles, les types et les attributs).
Tête. Côtté opposé au revers. On donne ce nom à la première face de la médaille, parce qu’en effet, le plus communément, elle n’est chargée que d’une tête. Cendendant, on y trouve aussi ces thermes, des bustes et même des figures entières.
[fol. 9r] Les têtes sont ordinairement couvertes ou nues ; ces dernières annoncent des princes qui n’ont point régné, ou les enfans de quelque souverain. Si elles sont couvertes, elles le sont ou d’un casque, ou d’un diadème, ou d’une couronne, ou d’un voile. Disons un mot de chacun en particulier.
Le cassque est le plus ancien ornement de tête ; on le donne indifféremment aux dieux, et aux mortels. Celui de Rome est revêtu de deux ailes. Celui de quelques souverains grecs portoit deux cornes de Jupiter Ammon. Celui des rois de Syrie est défendu par des cornes de toreau.
Le diadème tire son origine de la Grèce, où il étoit d’un usage général. Les empereurs romains n’ont commencé à le prendre que dans le Bas Empire, ainsi on doit regarder comme controuvées toutes les médailles où la figure du prince en est revêtue avant cette époque.
La couronne se donne à tous les souverains et même aux princesses. Dans son origine, elle étoit simplement de laurier, et cependant elle ne s’accordoit que très difficilement. Jules César est le premier qui ait eu le droit de la porter et ce droit lui fut accordé par le Sénat et le peuple. Elle conserva cette forme noble et simple jusqu’à Justinien qui en éleva les bords, et lui donna plus de profondeur. Outre cette couronne qui annonce le pouvoir, et qui ne convient qu’aux souverains, il y en avoit de divers autres espèces que l’on distribuoit suivant la nature de l’action qui l’avoit méritée, ainsi elle étoit radicale dans les consecrations ; rostrale (c’est-à-dire composée de proues de vaisseau entrelacées) après une victoire navale ; murale (formée de tours) pour une victoire remportée sur terre, ou la prise d’une ville ; d’une seule branche de laurier, pour les citoyens illustres par de grandes actions ; de chêne pour ceux qui avoient rendus des services moins brillants, mais peut-être aussi utiles ; de cranes de boeufs entrelacés de vases et de bandelettes, pour les prêtres et les augures.
Le voile marquoit le sacerdoce, il étoit particulier aux prêtres. Il se donne aussi aux empereurs romains, parcequ’ils avoient le titre de souverains pontifs.
Volume. Terme général par lequel on désigne la grosseur, le contour et l’épaisseur d’une médaille, ou même les proportions, et le relief plus ou moins saillant des figures. C’est sur ce double principe qu’est fondée la distinction de trois bronzes ; dans laquelle, pourtant, on a plus égard à la sailliée et à la précision de la ronde bosse, qu’au module de la médaille elle-même.
[fol. 9v] Pour rendre ce paragraphe un peu plus succeint, j’y ai omis tous les termes qui sont d’un usage très rare, ainsi que ceux qui sont assez intelligibles par eux-mêmes, pour n’avoir pas besoin d’être définis, d’ailleurs on en trouvera encore beaucoup d’autres expliqués, par ci par là, dans le cours de ce petit ouvrage, à mesure que les circonstances l’exigeront.
S. 2
Explication des abbréviations qui se trouvent dans les légendes, les inscriptions et les exergues.
Je vous ai dit que les légendes sont formées ou des mots entiers, ou d’abbréviations, ou simplement d’initiales. Ce ne seroit en quelque sorte, qu’une demie difficulté si l’un ou l’autre de ces moyens étoient constament suivi dans la même légende ; mais il en est où ces trois manières se trouvent employées en même tems, et sans aucun ordre déterminé. Ce qui les rend encore plus difficiles à entendre, c’est que la ponctuation n’y est presque jamais observée exactement ; soit qu’en frappant ces médailles, on n’ait pas regardé, comme une chose très nécessaire, de soigner cet objet, dans l’idée où l’on étoit que les divers symboles gravés sur les médailles, étant tous des objets familiers, même à la populace, ils pouvoient être entendus de tous le monde avec facilité ; soit que cette mauvaise ponctuation fut la suite de l’ignorance ou de la précipitation des monétaires ; soit enfin que le laps de tems ait fait, à la longue, disparoître ces points foiblement imprimés. On me demandera peut-être comment ou la rouille, ou le frotement, tout en détruisant ces points, ont ménagé les caractères. Je répondrai que c’est parce qu’ordinairement les lettres sont frappées avec plus de profondeur et de relief que les points qui les suivent.
J’ajouterai que ces caractères occupant un espace beaucoup plus considérable, ne peuvent guerre s’effacer entièrement partout ; et que le peu de traces qu’ils laissent, quelque foibles qu’elles soient, combinées avec les lettres précédentes, et avec celles qui suivent, peuvent néanmoins faire deviner ce qu’ils ont été, ressource qu’on n’a pas avec les points.
Au surplus, nous n’avons que trop des médailles ou cet inconvénient a lieu, même pour les lettres et dans ce cas, quelques précieuses que puissent être ces médailles, nous sommes contraints de les ranger parmi les incertaines, faute de pouvoir les entendre.
Quoiqu’il en soit, lorsqu’on trouve plusieurs lettres qui ne forment pas des mots entiers, [fol. 10r] et que le défaut de points empêche de reconnoître, si ce sont des abbréviations ou des initiales, alors il n’y a pas d’autres moyens pour s’en assurer que de joindre ensemble ces caractères par deux, trois ou quatre ; si d’après cette union, elles ne signifient rien de sensé, et de suivi, on peut en conclure que ce sont de simples initiales ; si, au contraire, elles forment un sens intelligible, ce sont des abbréviations.
Quand je dis un sens intelligible, je dis trop peu ; car l’interprétation dont il est susceptible, ne doit pas seulement être raisonnable, et offrir quelque vraissemblance, il faut qu’elle s’accorde avec la chronologie et l’histoire, et qu’elle s’adapte, comme d’elle même, aux symboles qu’elle a à faire connoître. Une médaille de Licinius nous offre un exemple qui va rendre cette vérité sensible. La légende de la tête, et celle du revers (qui semblent n’en former qu’une, puisque le sens n’est complet qu’à la fin de la seconde), présentent les lettres suivantes écrites d’une seule suite, et sans être séparées par aucun point. DDNNILOVLICINVEAUSCAESCIIIPPPOM. Au premier coup d’oeil, cette longue suite d’initiales sans liaison, ne présente qu’un chaos inintelligible, mais supposez un antiquaire versé dans toutes les profondeurs de l’art numismatique ; d’abord, il reconnoîtra sans peine la tête de Licinius, sur la première face, et dans les symboles du revers, il appercevra les emblèmes relatifs aux guerres de ce prince contre ses deux conpétiteurs à l’Empire, or aidé de ce double secours, pour peu qu’il donne d’attention à la légende, il saura bientôt la ponctuer comme elle doit l’être ; et alors, au lieu de ce bizarre assemblage des lettres que nous croyons si mal assorties ; nous lirons distinctement 22difficile à éclaircir. DD. NN. IOVLIC. INV. E. AUS. CAES. C. III. P. P. P. O. M., or d’après cette ponctuation, pour peu qu’on soit au fait du stile des médailles, on remplira sans peine les vuides que laissent ces abbréviations, et l’on rendra ainsi cette double légende « Domino Nostro Iovio Licinio Invicto et Augusto Caesari Consuli Tertium, Patri Patria, Principi Optimo Maximo ».
J’ajouterai ici une petite observation qui peut-être ne vous sera pas tout à fait inutile ; c’est que quelques puissent être les légendes, soit qu’elles se forment des mots entiers, ou d’abbréviations, ou d’initiales, ces mots qu’elles annoncent, ne doivent pas toujours se traduire de la même manière. Quelquefois ils se lisent au nominatif, comme dans cette médaille d’Auguste [fol. 10v] Caesar Augustus Pontifex Maximus Consul Secundum, Pater Patrio. D’autre fois, ils se prennent au génétif ; ainsi on doit lire : Divi Julii Caesaris Invicti &c. ; mais le plus souvent, il faut les supposer au datif ; telle est la médaille de Trayan : Imperatori NervaeTrayano Germanico &c. On trouve même quelques exemples de l’accusatif, mais ils sont rares surtout dans les médailles romaines.
Quant aux édifices dont l’empreinte se voit sur l’un ou l’autre côtté des médailles, la légende qui y a rapport, doit se lire au datif, si elle fait mention de temples consacrés au monarque dont cette médaille porte la tête ou du moins le nom ; et au génétif ou à l’ablatif, si ce sont des bâtimens érigés par ce prince.
1.
Lettres initiales
A. ............................ Augustus.33 Les noms propres s’écrivent souvent par des initiales, et doivent se lire comme celui-ci. Les prénoms, surtout dans ce cas, ainsi on écrit I. C. ou I. Caes. pour Iulius Caesar – S. S. G. ou S. S. Gal. pour Sergius Sulpitius Galba.
AA. A. .................... Auro Argento &c.
A. F. P. ................... Actum Fide Publicâ.
A. C. ....................... Adlocutio Cohortum.
A. U. C. .................. Ab Urbe Conditâ.
A. N. U. .................. A Natalitiis Urbis.
B. T. ........................ Beata Tranquilitas.
C. II. III. &c. ........... Consul 2.um 3.um
C. R. ........................ Claritas Reipublicae.
C. S. ......................... Cornelio Supera, &c.
.................................. Claritas saeculi.
C. V. T. .................... Colonia Vit[..] Togata.
D. A. P. .................... Divus Augustus Pater.
D. C. ........................ Decennalia Caesarum.
D. D. .........................Decreto Decurionum.
...................................Donno Dedit
................................... Dedicaverunt.
.................................... Deo Domestico.
.................................... Divo Decio, &c.
D. F. ........................... Decennalia Feliciter
D. D. N. N. ................ Domino Nostro.
F. B. ........................... Felicitas Temporum.
H. A. .......................... Hercules Adsertor.
L. LL. ....................... Legio, Legiones.
M. O. P. ..................... Maximo Optimo Principi.
N. C. A. P. R. ............. Nobis Concessum Auctoritate Populi Romani.
N. C. ........................ Nobilis Caesar.
P. A. ........................ Pietas Augusta v. Augusti
P. D. ....................... Primi Decennales.
P. M. ....................... Pontifex Maximus.
P. P. ......................... Pater Patriae.
P. R. S. ..................... Populi Romani Signum.
P. T. .......................... Percussum Treverris.
P. V. V. ...................... Primis Votis Quinquennalibus.
[fol. 11r] __ X. ..................... ___ Decennalibus.
__ XX. ........................ ___Vicennalibus.
R. ............................... Restituit.
S. A. ........................... Securitas Augusta _ (i)
..................................... Saluti Augusti.
S. C. ............................ Senatus Consulto.
S. M. A. ...................... Sacra Moneta Augusti.
S. P. Q. R. ................... Senatus Populusque Romanus.
S. R. ............................ Senatus Romanus.
S. T. M. ....................... Signata Traveriae Moneta.
T. F. .............................. Temporum Felicitas v.
....................................... Vota Imperii.
V. P. ............................... Vota Publica v. Populi.
V. F. R. ........................... Vota Feliciter Renovata.
V. V. M. X. ..................... Votis Quiquennalibus Multis Decennalibus.
___ M. XX. ..................... Multis Vicennalibus.
V. Q. F. A. ....................... Votis quinque Feliciter Absolutis.
___ .................................... Decenn. Vicenn. &c.
2.
Initiales des frontispices
A. A. L. M. P. ................... Ad Agrum Locum Monumenti Posuit.
B. M. P. I. ......................... Bene Mercenti Posuit.
D. M. ................................ Divis Manibus v. __
........................................... Diva Memoria.
H. B. M. F. C. .................... Haeres Bene Maerenti Faciendum Curavit.
H. S. V. F. M. ..................... Hoc Sibi Vivens Fieri Mandavit.
I. C. F. ................................ Inaeta [Intra ?]Tempus Constitutum.
M. H. P. P. .......................... Monumentum Haeredes Posuerunt.
N. F. N. ............................... Nobili Familiâ Natus.
O. M. P. E. C. ...................... Ob Merita Patriae et Concordiae.
P. C. ..................................... Ponendum Curavit v.
............................................. Populo Consentinte.
PP. ....................................... Posuerunt v. Patri Posuit.
P. S. F. C. ............................ Proprio Sumptu Faciendum Curavit.
R. P. C. ................................ Retro Pedes Centum.
S. N. ..................................... Supra Numerum.
V. S. ...................................... Votis Senatus. &c.
3.
Abbréviations.
Aug: ........................ Augusti. __
Augg: ...................... Augustorum.
Affr: ......................... Affricanus v. Affrica.
As: ............................ Asiaticus v. Asia.
Au: Cor: ................... Aurum Coronarium.
Au: Lust: .................. Aurum Lustrale.
Au: Vices: ................. Aurum Vicesimarium.
Aeq: Vesp: ................. Aequitas (moneta) Vespasiani.
Caes: .......................... Caesaris.
Caess: ........................ Caesarorum.
Fl: For: ....................... Florente Fortuna.
For: Raed: ................... Fortunâ raeduci.
Leg: Legg: ................... Legio. Legiones.
Lib: Traj: ...................... Liberalitas Trajani.
Mun: Aug: .................... Municipium Augusti.
[fol. 11v] Pl: Ur: ................... Plaeb[..] Urbanae.
Rest: .............................. Restuit v. Restauravit.
Sic V. ............................ pour Votis Quiquennalibus.
__ X. M. XX. ................. Votis Decennalit[.]. Multis Vicenn.
Tr: Pot: ........................ Tribunitia Potestate.
X ................................. Denarius (10 as de cuivre.)
V. -2. ........................... Quinaire (5 as.)
I. L. L. - S. ................... Sesterce (2 + as.)
J’ai joint ici quelques unes des initiales qui se rencontrent dans les inscriptions de divers monumens, parceque vous pouvez vous trouver dans le cas de les y lire, sans les comprendre ; et parceque d’ailleurs elles sont quelquefois aussi employées dans les légendes de certaines médailles, surtout de celles qui ont été frappées à l’occasion de ces monumens. Au surplus, je suivi pas-à-pas M. de Jaucourt dans l’interprétations que j’en ai donné ; mais, je n’ai pas été aussi prudent dans celle des initiales des médailles. Je m’y suis parfois un peu livré à moi-même ; et peut-être n’en ai-je pas mieux fait.
Quant aux abbréviations, j’en ai beaucoup moins indiqué que d’initiales, parce qu’elles sont de leur nature beaucoup plus faciles à entendre. D’ailleurs, vous pouvez, de toutes les initiales, faire des abbréviations en y ajoutant quelques unes des lettres qui doivent suivre ; comme par la voie contraire, vous pouvez réduire les abbréviations à de simples initiales.
Au reste, si vous avez besoin de détails plus étendus sur l’un comme sur l’autre, je tâcherai de vous faire avoir le trésor de Goltzius ; ou le commentaire d’Ursatus dont j’ai fait mention dans le catalogue des auteurs qui ont traité de l’art numismatique.
S. 3.
Explication des symboles et attributs qui chargent les deux côté des médailles.
Les antiquaires désignent assez comunement sous le nom général de type ou de symbole, toutes les figures que peuvent annoncer les médailles, tant sur le côtté de la tête, que sur les revers, mais plus souvent sur ce dernier, quoique pourtant elles se voyent quelquefois sur tous les deux, en même temps ; mais, comme ces symboles sont de plusieurs espèces, et d’espèces très différentes, il me semble qu’il ne sera pas tout-à-fait hors de propos de les caractériser ici avec un peu plus de précision. – Je distingue donc trois espèces de symboles. Le symbole proprement dit, l’attribut, et le type.
J’appelle symbole toute figure qui, par espèce de convention tacite, est exclusivement destinée à représenter tel ou tel objet, avec lequel pourtant elle n’a pas toujours [fol. 12r] des traits de ressemblance bien frappans. Ainsi parmi les plantes, l’olivier désigne la paix, le laurier – les victoires ; le chaîne – des services rendus à la patrie &c. Parmi les animaux, le coq peint la vigilance, la cigogne est l’image de la piété filiale, une corneille perchée désigne la foi conjugale. Parmi les instrumens, le luth indique les fêtes d’Appollon, le sistre, celle d’Isis, le crotale, celles de Cybélé, &c.
L’attribut est tout objet quelconque, animé ou inanimé que l’on joint à la figure d’un dieu ou d’un homme, pour peindre quelques unes de ses propriétés. Ainsi, la foudre et l’aigle sont les attributs de Jupier ; le thyrse et la panthère sont ceux de Bachus, d’où l’on voit que les traits de ressemblance qui rapprochent les attributs, des objets auxquels ils conviennent, sont plus réels que ceux qui se remarquent entre les symboles et ces mêmes objets.
Parmi ces attributs, il en est qui peuvent indifféremment, ou rester unis aux figures auxquelles ils conviennent, ou se joindre à telles autres figures que ce soit, pourvu qu’elles ayent quelque rapport avec les premières ou enfin en demeurer entièrement séparés. Dans ce dernier cas, ces attributs rentrent, en quelques sorte, dans la classe des symboles, à cette différence près qu’ils peuvent s’employer de ces tois manières différentes, et que le symbole n’a lieu que dans le dernier cas, ainsi, par exemple, la foudre placée dans les mains d’un empereur, ou dans celle du maître des dieux, ou même représentée seule au revers de la tête d’un monarque quelconque, désigne également le souverain pouvoir.
Mais, il en est aussi qui, dès qu’ils sont séparés de la figure qu’ils doivent accompagner, ou ne signifient plus rien du tout, ou offrent un sens tout-à-fait différent, et quelquefois même opposé. Ainsi, dans le premier cas, un coq, un croissant, un bonnet arménien, tous les trois attributs du dieu Lunus, s’ils se représentoient séparement, ne rappelleroient plus aucune des idées que leur prête, en quelque sorte, leur union avec la figure du dieu d’Arménie ; que dis-je, ils n’offriroient plus qu’une expression vague et indéterminée. Dans le second cas, une roue sous les pieds de la Fortune désigne l’inconstance. Sous ceux de Némésis, c’est le supplice des méchans ; seule, elle annonce la réparation des chemins publics.
Le type est une espèce d’allégorie ou d’emblème, qui devient comme la figure d’un objet duquel il se rapproche par des traits de ressemblance plus ou moins sensibles. Il désigne [fol. 12v] ou un événement futur, ou une chose qui, d’après le cours ordinaire des actions de l’homme, devroit avoir lieu. Ainsi, la première acception, le paon et l’aigle gravés par la flatterie sur la médaille d’une princesse encore vivante, annonce sa consécration future. Dans la seconde, une tortue désigne la vie sédentaire que les femmes mariées doivent mener. – D’après cette définition, il paroît que le symbole a plus trait à la nature des choses en elle-mêmes, ou des êtres physics, et que le type se rapporte plutôt aux événemens. Cependant, il a cela de commun avec le symbole, qu’il s’employe, comme lui, séparement, et qu’il n’est de même que l’emblème ou la figure de l’objet que l’on veut rendre, et non son attribut.
Pour ne point nous écarter de l’ordre que je viens en quelque sorte de me tracer, je commence par les attributs, et je passerai ensuite aux symboles, comme étant plus vagues et plus généraux ; mais, pour les uns comme pour les autres, je me contenterai de vous les indiquer sans discuter ni leurs propiétés, ni les divers interprétations dont ils peuvent être succeptibles, tant au figuré que dans leur sens propre. Je remets à notre première entrevue tous ces détails qui m’entraîneroient trop loin à présent ........ En attendant, les ouvrages que je vous envoie, pouront vous aider dans cette recherche. D’ailleurs, vous pourrez aussi recourir aux petites explications dont j’ai accompagné les médailles de Lasius, que je vous ai dessinées avec toute la précision dont peut être capable un homme qui n’est rien moins que dessinateur.
1.
Attributs.
Attributs propres aux divinités.
1. Déités [...].
La foudre et l’aigle sont les attributs de Jupiter. – Le trident est celui de Neptune, un enfant assis sur un dauphin, annonce les trois dieux marins, Mélicerte, Postumne, et Palémon. Le thyrse entrourré de lierre ou de pampre désigne Bachus, son char est traîné par des tigres.
Le paon est l’oiseau de Juon. – Le coq est celui de Latrone. – On donne à Cybélé une couronne de tours, parcequ’elle est la déesse de la terre, qui porte des villes. – Une étoile et un sistre sont les attributs d’Isis, on lui met une fleur sur la tête. – Une couronne d’épis annonce Cerès, son char est traîné par des serpens. – Une grenade fait reconnoître Proserpine. – Un croissant, un arc, un carquois annoncent Diane, son char est traîné par des cerfs. – Le palladium est le signe de Vesta. – Mars est représenté avec le casque et la cuirasse, tenant une pique d’une main, et de l’autre un trophée. – Les mêmes attributs servent aussi à Minerve, [fol. 13r] en la reconnoît à son égide. – La pomme et le carquois conviennent à Vénus, un enfant ailé l’acompagne. – Vesta se reconnoît au palladium. – Le serpent désigne Minerve. Le chat-huant est aussi son oiseau favori, &c.
2. Déités inférieures.
La Providence se représente souvent par une main qui tient une baguette dont elle touche un globe. – La Piété, ordinairement couverte d’un voile, a les bras étendus, et une cigogne à ses pieds. – La Liberté porte un bonnet (qui étoit le signe de l’affranchissement) et la baguette nommée vindicta. – La Libéralité tient dans la main une tablette carrée, marquée de quelques points. La Noblesse porte la haste d’une main, et de l’autre une petite image. – La Pudeur, couverte d’un grand voile, a le doit sur sa bouche (cet attribut est aussi celui de Silence). La Fortune se désigne assez communement sous la figure d’une femme, appuyée sur un gouvernail, ayant une roue sous ses pieds, et une corne d’abondance à la main. – Ce que les Romains appeloient Virtus, le vrai courage, s’annonce sous les traits d’une femme caquée, tenant d’une main une haste, et de l’autre le parazonium. – La Félicité se peint aussi comme une femme debout, vêtue de la stole, tenant le caducée d’une main, une poignée d’herbes naissantes en un bouquet de fleurs, et de l’autre relève sa robe par derrière.
La Fécondité se représente par une femme à demi nue, avec de grosses mammelles, appuyée sur une corbeille de fruits et entourée de petits enfans. – La Joie est une femme debout, l’air souriant, tenant de la main droite une branche d’arbre et de la main gauche un sistre ou une corne d’abondance. – La Bonne Foi tend la main droite en signe d’assurance. – Une figure tient dans une de ses mains la tête du Soleil, dans l’autre, celle de la Lune, c’est l’Éternité. – Trois figures qui soutiennent un voile déployée au dessus d’elles, marquent les trois espèces du tems, le Passé, le Présent et le Futur. – Les quatre saisons s’annoncent par quatre petites figures placées, l’une auprès de l’autre. L’Hiver est vêtue ; le Printems a des fleurs ; l’Été – des fruits et une faucile ; l’Automne – un lièvre. – L’Équité s’annonce par une balance, cet attribut est aussi celui de la Monnoie. – Des figures debout ou plus souvent couchées, et appuyées sur des vases d’où sort de l’eau, ce sont des Fleurs et les Rivières.
[fol. 13v] BB. Quelques unes de ces verbes se désignent aussi par des oiseaux, qui dans ce cas en sont les symboles, au lieu d’en être les attributs, et, par conséquent, appartiennent à la division suivante. Les plus ordinaires sont les suivants .............. Le coq désigne la vigilance, l’aigle – la sublimité ou la fierté ; la corneille perchée – la foi conjugale ; le chien – la fidélité ; la cigogne – la piété filiale ; l’éléphant – l’éternité ; la harpie – la valeur ; le hibou – la prévoyance ; le lapin – l’abondance ; le phénix – l’espérance ou l’éternité ; les pigeons – l’amour ou la tendresse ; le poisson – la pêche des villes maritimes ; le sphinx – la prudence ; la tortue – la vie sédentaire que doivent mener les femmes mariées ; la tourterelle – la foi conjugale ; l’abeille – l’industrie ; la fourmi – la constance dans le travail, ou la prévoyance de l’avenir, &c.
3.
Déités [...]ticulières
Le canope d’Égypte se représente par un pot de terre, d’où sort une tête qui porte la fleur d’Isis. Le coq est attribut du dieu Lanus, on lui donne en outre un croissant, et un bonnet à l’arménienne. Astrarté, déesse des sydoniens, est représentée tantôt sur un lion, tantôt sur un char à deux roues. La Diane d’Éphèse a une infinité de mammelles qui toutes paroissent également remplies, elle est soutenue, par des appuits, serpent convient également à hygée, Salus, et Esculape, &c.
4.
[At]tributs [...] royautés [..........]
L’Afryque est coeffée d’une tête d’éléphant, elle a auprès d’elle un scorpion, un lion et un serpent. L’Asie est aussi désignée par le serpent, on lui joint un vaisseau. Le toureau est quelquefois l’attribut de l’Europe. L’Orient se représente par une tête couronnée de rayons, et qui annonce la jeunesse. La Macédoine est souvent vêtue en cocher, un fouet à la main, elle porte aussi la massue d’Hércule. La Mauritanie s’annonce par un cheval et une petite houssine. L’Egypte se reconnoît au crocodile qui est à ses pieds, ainsi qu’à l’ibis et au sistre. L’Achaie tient des épées dans sa main droite, un lapin est couchée sous ses pieds. On lui donne aussi quelquefois un petit bouclier et deux javelots. La Judée vêtue d’une robe longue est appuyée contre un palmier. La Gaule vêtue d’un sçaye, porte le javelot nommé gaesum. L’Arabie se marque par l’arbre qui porte l’encens, et par un chameau. La Dace est en [fol. 14r] habit de femme, portant un javelot, avec une tête d’âne, de boeuf, ou de cheval. La Scicile est désignée par une tête au milieu de trois cuisses (ce sont ses trois promontoires). L’Italie est quelquefois assise sur un trône, quelquefois debout, une couronne tourrelée sur la tête, une haste et une corne d’abondance à la main. La Germanie s’annonce sous la figure d’une grande femme portant un javelot et un bouclier étroit. La Suisse se désigne par la pomme de pin. L’Armenie tient un arc et des flèches, elle est coifée d’un bonnet à la mode du pays. La Pannonie se désigne par deux figures de femmes vêtues, tenant des enseignes militaires à la main. La Cappadoce porte une couronne tourrelée, et un guidon de cavalerie ; elle a souvent le mont Argée sous ses pieds. Le royaume de Phartes est une femme vêtue à la mode du pays, retroussée d’un côtté jusqu’aux genoux, et armée d’un arc et d’un carquois. La Mésopotanie placée entre deux figures de fleuves, tient une corne d’abondance. La Grande Bretagne s’appuye sur un gouvernail, et a une proue de navire à ses pieds. Carthage prend pour attribut le cheval. Éphèse – des abeilles ou un cerf ; et toutes les villes maritimes en général – le cancre.
II.
Symboles.
Une branche de laurier est le symbole de la victoire ; celle d’olivier désigne la paix. Deux mains jointes signifient la concorde ou les alliances de deux peuples, de deux villes, ou de deux familles. Une enseigne militaire désigne une légion, plusieurs en annoncent plusieurs. Si elles sont pliées et couchées les unes sur les autres, elles peignent le serment de fidélité de ces légions, à l’empereur. Lorsqu’elle sont relevées, elles rappellent une victoire, placées sur un autel, elles annoncent l’établissement d’une colomnie formée de vieux soldats, et qui s’est mise sous la protection des dieux. Un gouvernail posé sur un globe, marque l’autorité sur mer et sur terre. Le bouclier est le signe d’une expédition. Dans les médailles votives, il annonce les voeux faits par le peuple pour le monarque regnant alors. Des urnes, des corbeilles d’où sortent des branches de palmier, annoncent des jeux publics, ou séculaires, ou particuliers, si on y voit le symphule (petit vase employé pour les libations), cela signifie que ses jeux ont été accompagnés de sacrifices. Un vaisseau en course peint une expédition navale ; aux pieds d’une figure ailée, il annonce une victoire sur mer. Une grappe de raisin désigne l’abandance et la joie. [fol. 14v] Une harpe annonce le culte d’Appolon, plusieurs réunies, indiquent les villes où ce dieu était particulièrement honoré. D’où il sort des grains de bled, ou un bouquet d’épies annonce une distribution de bled faite au peuple, dans une année de famine. Un bâton (lituus) terminé par le haut en forme de crousse, convient aux augures. Un bonnet surmonté d’une pointe avec deux pendans, annonce la dignité sacerdotale. La chaise curale est le symbole de la magistrature, si elle est traversée d’une haste, elle devient le symbole de Junon. Un char découvert, terminé par des chevaux, des lions ou des éléphans, annonce quelquefois le triomphe, quelquefois l’apothéose des princes. S’il est couvert et traîné par des mules, il désigne la consécration des princesses. Un panier des fleurs et des fruits annonce la fertilité d’un pays. Un espèce de cheval de Frise fais de pieux entrelacés, représente un camp rétranché. Le trépié couvert ou non couvert, s’il est accompagné d’un dauphin et d’une corneille, est le symbole des quinze-virs députés pour garder les oracle des Sybelles, et pour les consulter (on sçait que la corneille étoit consacré à Cyppollon, et que le dauphin étoit l’enseigne de ces 15 virs dans leurs cérémonies). Le Zodiaque, chargé de tous les signes célestes, marque l’heureuse étoile des princes qui soutiennent le poids du gouvernement, et qui en sont comme l’âme et le centre. L’ancre marque la puissance navale ou les victoires sur mer. Une colomne annonce la fermeté d’un prince dont le règne a été troublé. Des branches de palmier séparées désignent les enfans des princes. Lorsqu’ils sont encore vivans, s’ils sont morts, et mis dans le ciel au rang des dieux, ils se représentent par des étoiles. Une toise marquée à chaque pied, annonce la mesure des terres données à une nouvelle colomnie. Le boisseau qu’on y joint quelquefois, désigne le bled fourni par l’empereur pour l’encemensement de ces terres. Un masque est le symbole des jeux scéniques. Un panier couvert avec du lierre à l’entour, et une peau de faon, annonce le mystère des bacchanales. Deux figures, ayant le doit sur la bouche, font reconnoître les déesses Némésis lorsqu’elles ont une roue à leur pieds. Trois figures armées de flambeaux et de poignards, désignent les Euménides. Trois figures nues qui se tiennent par la main, ce sont les trois Grâces, &c. Quant aux autres symboles, l’usage et l’abitude de voir des médailles vous les feront bientôt connoître.
[fol. 15r] Chapitre premier.
Origine et progrès de l’art numismatique, tant chez les anciens que chez les modernes.
Avant d’entrer dans les détails des principes ; et de règles auquelles la réflexion et l’étude ont enfin assugeti l’art numismatique, jettons donc un léger coup d’oeil sur cet art lui même, remontons à son origine, et suivons en les progrès chez les divers peuples qui l’ont cultivé, chez ceux surtout qui en ont fait une étude plus particulière.
Rien n’annonce que chez les anciens on ait jamais eu ce qu’on peut vraiment appellé le goût des médailles. On en frappoit, on mettoit même dans leur exécution, ce fini, ce relief, que nos graveurs modernes n’ont encore pu attendre ; mais, ces médailles, travaillées avec tant d’art, répandue partout, et connues de tout le monde, n’étoient rassemblées par personne. Personne ne formoit ses collections ni cabinet. Les Romains tantôt ennemis des Grecs, tantôt leurs alliés, et enfin leurs vainqueurs, n’imaginèrent jamais de regarder comme un trésor cette foule des médailles exécutées avec le plus grand soin, et qu’ils trouvoient chez eux par milliers. Que dis-je ! Il ne leur vint même jamais en esprit de conserver celles qui se frappoient au sein de leur propres états, et sous leurs yeux. Quant à celles qui, des siècles antérieures, avoient eu pour objet d’immortaliser le nom de leurs héros, de leur législateurs, et de leurs chefs (et qui leur avoit plutôt transmi le hazard, qu’un vrai désir de les voir échapper au ravage des tems) ; il est assez vraisemblable qu’il en faisoit encore moins de cas, puisqu’ils attachoient si peu de prix à celles mêmes qu’ils étoient comme forcés d’avoir continuellement entre les mains. Ce que je dis ici des Romains, doit à plus forte raison encore s’entendre des autres peuples qui étoient bien inférieurs à cette nation illustre, et en fait de connoissance, et en fait d’art.
Les modernes n’ont guerres été plus envieux sur ce point que les anciens, et cette insouciance a duré jusque vers le commencement de quinzième siècle, ce fut alors que le goût des médailles commença à naître, à se répandre, et que la connoissance des ces prétieux restes de l’antiquité, devint une étude sérieuse et réfléchi. Il étoit bien juste que l’Italie qui avoit eu l’honneur de produire la plus grande partie de ces chefs d’oeuvres, [fol. 15v] eut aussi celui d’en sentir le prix la première, est de le faire connoître aux autres. Aussi, fut ce dans son sein que cet art respectable prit son premier essor. Pertarque44Son amour pour la belle Laure, aussi peu fortuné que constant, ses vers tendres et passionnés qui ont immortalisé sa maîtresse, Vaucluse et lui, le rendront toujours intéressant pour les hommes humains et sensibles. Aux yeux des sçavans, il a un autre mérite, celui d’avoir réformé sa langue, d’avoir été le créateur de la poésie italienne, d’avoir possédé presque toutes les connoissances, et de les avoir fait à la gloire des lettres et au bien de sa patrie. que ses amours et ses connoissances ont rendu si justement célèbre, ajouta à tant de services qu’il avoit rendus aux Lettres, celui d’inspirer à ses concitoyens le goût des médailles. Il en avoit rassemblé un certain nombre, et après en avoir formé une collection aussi suivie qu’elle pouvoit l’être de son temps, il l’offrit à l’empereur Charles IV, non comme au monarque le plus puissant, mais comme au sçavant le plus fait pour en apprétier la valeur.
Pétrarque eut la gloire qu’un homme de Lettres obtient rarement, celle d’avoir un roi pour imitateur, j’ai presque dit pour disciple. Un monarque qui a illustré son règne par des victoires, et les lettres par ses connoissances, Alphonse, roi d’Arragon et de Naples, marcha sur ses traces, se livra comme lui à l’étude de l’antiquité, et fit une assez vaste collection de médailles. Ses travaux en ce genre devinrent comme le premier trait de lumière qui dissipa les ténèbres dont étoit encore couverte l’histoire du Peuple Romain.
Témoin des avantages précieux que la collection de ce prince avoit procurée aux Lettres, un cardinal de St. Marc, nommé Antoine, entreprit d’en former une semblable à Rome ; ce projet étoit grand, mais d’une exécution difficile. Il demandoit des connoissances, des soins, du tems et des dépenses. Antoine ne ménagea rien, et il parvint à rassembler jusqu’à cinq cent médailles tant consulaires qu’impériales, lesquelles formoient une suite assez méthodique. Sans parler d’un très grand nombre d’autres qu’il laissa comme éparses, et dont il eut sans doute enrichi sa double collection, si la mort lui eût laissé le tems d’y mettre l’ordre qu’il avoit suivi dans les autres, ou si les circonstances lui eussent permit de les completter.
Ce n’étoient pourtant encore là que de foibles essais, et les premiers efforts d’un goût naissant ne pouvoient pas s’élever si promptement à ce degré de perfection qui [fol. 16r] caractérise les découvertes déjà anciennes, mais ce goût qui n’étoit encore, pour ainsi dire, assujeti à aucunes règles, s’épura bientôt, et acquit une consistance plus décédée à Horence, sous les Médicis, et à Rome par les soins de Léon X. Enrichis par le commerce, ils aimèrent mieux consacrer aux progrès des arts, qu’à leur plaisir, les richesses immenses que ce commerce leur avoit fait acquérir. L’or qu’ils repandoient, à pleines mains, de toutes parts, les rendit maîtres de presque tous les trésors qui avoient jadis fait l’ornement de l’Italie et de la Grèce. Les bas reliefs, les statues, les marbres, les médailles surtout qu’Athènes et Rome avoit travaillées avec le plus de soin, se rassemblèrent comme d’elle mêmes, et presqu’en un clin d’oeil, dans leurs somptueux palais ; on croyait vivre dans le siècle des Brutus, des Catons, des Epaminondas et des Aristides ; leur noms, autrefois si cher à la patrie qui leur devoit sa gloire, se prononçoient encore avec attendrissement, et le feu de leur austère vertu sembloit se ranimer dans tous les coeurs, encouragés par exemple de Médicis, et par les secours puissants qu’ils en recevoient sans cesse ; tous les gens de Lettres s’empressèrent d’entrer dans leurs vues, de les séconder dans leurs travaux, et d’étendre leurs découvertes.
Cependant, malgré tous leurs soins, la science des médailles étoit encore une étude pénible, et impratiquable même pour le commun des sçavans. C’étoit un trésor qui n’étoit ouvert que pour un certain nombre d’hommes privilégiés. Un de ses hommes, aussi généreux qu’il étoit instruit, résolut de rendre ce sanctuaire respactable acceptable à tous ceux qu’une vénération peu réfléchie en voit tenu éloignés jusqu’alors. Il en ouvrit en quelque sorte l’entré, et fit disparoître les obstacles imaginaires qui en fermoient l’accès. Cet homme dont le nom fait époque dans l’histoire de l’art numismatique, c’est Enée Vico. Son discours sur la connoissance des médailles, et sur leur utilité, rendit cette étude beaucoup plus facile, et en simplifia les principes. Il y entre dans des détails très méthodiques, et très suivis sur tous les objets que nous présente l’art numismatique, comme légendes, exergues, inscriptions, symboles, attributs, contremarques, coins, &c. Il y traite aussi des événemens que les principales médailles ont perpétués, des époques qui s’y trouvent marquées, des noms et prénoms de ceux qui y ont en part, des diverses charges dont il y fait mention, enfin de tout ce qui peut piquer la curiosité, à l’inspe[fol. 16v]ction d’une médaille quelconque, ou aider à en pénétrer le vrai sens.
Plusieurs autres écrivains formés par les leçons de Vico, les commentèrent, les étendèrent et y ajoutèrent leurs propres découvertes. Ainsi la lumière se répandit insensiblement de toutes parts, et bientôt, tout ce qu’il y eut d’hommes riches en Italie, voulurent avoir un cabinet d’antiquités.
Le service que Vico avoit rendu à l’Italie, Golécius le rendit aux Pays-Bas. Son grand et magnifique ouvrage, où il explique par les médailles, l’histoire de la Scicile, de la grande Grèce et de ses Isles, fit germer dans toute la Flandre, le goût de Belles Lettres, et surtout celui de l’antiquité. Ce goût qui ne faisoit à peine qu’éclore, et que les Flamands n’avoient point eu le tems de perfectionner, passa la mer, et pénétra, encore informe, dans la Grande Bretagne, mais il y atteignit bientôt un dégré de sublimité auquel il ne fut jamais parvenu dans les États qu’il venoit de quitter. Le génie anglois lui communiqua sa vigeur mâle, et il y produisit, au bout de quelques années, des fruits aussi salutaire qu’abondans.
Pendant que l’étude de l’antiquité faisoit de si rapides progrès en Angletterre, elle se répandoit aussi, mais d’un pas plus lent en Allemagne ; et c’étoit de la même source qu’elle y étoit parvenu. Mais, jamais peut-être cette connoissance n’y eut acquis le degré de perfection qu’elle atteignit par la suite, si un monarque aussi sçavant que guerrier, ne se fût lui même livré à cette étude, et n’y eût encouragé ses sujets par son exemple, ses travaux et ses bienfaits. Maximilien I rasssembla beaucoup de médailles parmi lesquelles il s’en trouvoit de très curieuses ; et ce trésor qui passa entre les mains de ses successeurs, fut pour eux un motif de l’augmenter autant qu’ils purent. Maximilien II surtout contribua à faire fleurir ce goût dans sa nation ; et c’est à lui que nous devons cette collection célèbre qui a fait tant de bruit dans le monde sçavant, qu’on a exalté d’abord avec enthousiasme, mais qu’on a sçu enfin remettre à sa place. Je parle de cette collection de médailles impériales, qui s’étend, sans inerruption, depuis Jules César jusqu’à Mathias, collection que ce prince fit battre pour prêter un nouvel éclat à sa maison, et dans laquelle près d’un tiers des médailles sont fausses. On verra ce qu’on en doit penser, à l’article : Médailles modernes.
Je ne parlerai point des progrès que cette science a faits chez les François, [fol. 17r]