Catéchisme des Mystères du Gouvernement de Pologne

(Iv) Surowa Krytyka na Nierząd który zgubił Polskę!

(1r) Catéchisme des Mystères du Gouvernement de Pologne tel qu’il était vers l’année 1735. / Composé en Langue Anglaise par M.r Sterne, puis traduit en Français, & maintenant enfin en Polonais. Ouvrage aussi amusant qu’[u]til11 ms. qu’til. pour l’instruction de la Jeunesse. / à Samborz. / de l’Imprimerie de Sa Majesté Imperiale […]22 Abréviation incompréhensible. Apostolique. Le 10. Janvier, l’an de Grace 1790.

(2r) Catéchisme des Mystères du Gouvernement de Pologne.

Demande : Quelle est la forme Politique de la Pologne ?

Réponse : La Pologne est un Roïaume avec & sans Roi ; et en même tems une République.

D : Qui a créé cette République ?

R : Les Privilèges et le désordre.

D : Qui dispose du Pouvoir Législatif et Exécutif dans la République ?

R : Le Roi, le Senat & l’Etat-Equèstre, qui forment Trois Etats, mais une seule Noblesse.

(2v) D : Le Roy est-il Noble ?

R : Ouï.

D : Le Senat est-il Noble ?

R : Ouï.

D : Les Nonces sont-ils Nobles ?

R : Ouï.

D : Ainsi ces Trois Etats ne composent donc qu’un seul Etat ?

R : Pour ceci, c’est un Mistère incompréhensible que la République, n’aïant que le seul Etat Noble pour son Gouvernement, en a fait cependant Trois, & cela aussi artificiellement que de la seule Personne Roïale Elle a sçûe instituer pareillement un Etat.

(3r) D : Ceci prouve donc que toute la Majesté du Gouvernement de Pologne n’est en effet autre chose que la République des Nobles ?

R : Pour ceci c’est une Verité averée, chez le Commun des Polonais, que quiconque n’est pas Noble, est à peine un33 ms. une. homme.

D : Mais coment les Droits de la Nature peuvent-ils se changer par la Constitution de la Nation Polonaise ?

R : Eh ! que pensez Vous ? là où il est question de l’Authorité de la Noblesse Polonaise, il faut bien que des Droits aussi minutieux, que ceux de la Loi de Nature, leur cèdent.

(3v) D : Il s’ensuit donc que le Laboureur ou Villageois n’est pas homme en Pologne ?

R : Assûrement que non.

D : Et comment donc cela, puisqu’il a cependant un Corps & une Âme, et qu’il est homme tout comme le Noble ?

R : Parceque le Païsan de Pologne, n’a que les attribûts de l’Âme & du Corps, mais quant à Sa Personne, elle n’est pas humaine, puisque cette qualité n’est propre qu’aux Nobles, qui etant les maîtres absolûs de ces Esclaves, peuvent les achetter, les vendre & en tirer tout profit comme des Béstiaux que l’on vendrait avec quelque Métairie, en en dressant [4r] les Inventaires.

D : Et le Bourgeois, est-il homme ?

R : Le Bourgeois n’est pas tout à fait homme non plus, mais c’est un Etre intermédiaire entre l’homme-Noble, et le non-homme Païsan. En un mot, c’est ce que les Théologiens nomment Substantia incompleta.

D : Par quoi les Bourgeois ressemblent-ils aux Nobles ?

R : Par leur bien-être, les aisances de la Vie & l’Education, il est tout de même, & surpasse souvent le Noble qui ne se distingue dans ces choses d’avec le Bourgeois que par les Ordres, les Cordons, (4v) les Armoiries & les Uniformes de Districts, & enfin en cela que très fréquement le Noble lui fait bien des Salamalecs, pour qu’il lui prête de l’argent.

D : Par quoi le Bourgeois ressemble-t-il au Païsan non-homme de Pologne ?

R : Par ceci que le Bourgeois ne peut pas s’approprier toutes les qualités qui ornent la nature humaine.

D : Et cela pourquoi ?

R : Puisque la Loi le lui defend, par exemple : il ne peut pas aspirer à certains degrés de Vocation dans la Réligion, car la Loi lui defend d’être Abbé Régulier, [5r] ou Evêque de quelque Diocèse ; il ne peut montrer sa Valeur, puisqu’il ne peut devenir Officier ; il ne peut aider sa Patrie par ses Conseils, ni être un Cultivateur util, car il ne peut posseder des Biens-fonds ; en un mot, sa condition de Bourgeois dans la République ne forme nul état, ni n’est au rang des Citoïens.

D : De cette façon les Villes de Pologne sont probablement sans habitants.

R : Les habitans des Villes Polonaises doivent être regardés comme les Villes du Païs, c’est à dire que ces Villes sont composées de leur Nom & de leurs Ruïnes ; & que leurs habitants sont honorifiés de leurs anciens Droits [5v] & Prerogatifs, d’un mépris continuel de la Noblesse & de l’opression des Starostes.

D : Qui est-ce qui satisfait au besoin du Commerce, des Métiers & des Vuidanges dans un Païs aussi Vaste ?

R : Ce sont les Juifs, puisque quant à leur quantité, il y a à peine la dixieme partie qui de la Nation s’adonne à ce trafic.

D : Qu’est-ce qui en est la cause ?

R : C’est parceque toute espèce de trafic & Métier, & autre negoce est tellement défendû & prohibé à la Noblesse /: pour conserver la splendeur de son Etat :/ comme il est defendû de pécher contre [6r] les Commandements de Dieu & la Loi de la Nature. Et puisque la condition de la Vie Citadine est si fortement méprisée, les Juifs aïant un esprit plus souple & plus pervers, & aïant en même tems l’ame plus portée à la basesse & à l’endurement, ils remplacent aisement l’etat de bourgeoisie.

D : Mais j’observe par là que le Noble perd sa Splendeur, aussi tôt qu’il devient util à la Société, soit par quelque métier ou Négoce ?

R : Sans doute puisqu’en Pologne l’on n’abhorre & méprise pas tant le Vol & la perfidie, que le Commerce ou quelque Métier.

[6v] D : Il s’ensuit donc de là que la Noblesse doit être dans la plus grande indigence.

R : Tout au contraire, elle devrait être très opulente, puisque la Noblesse en Pologne signifie autant qu’un Monarque absolû sur le Trône.

D : Expliquez ceci plus clairement !

R : Avec plaisir. Je Vous dir[ai]44 ms. direz. donc qu’en Pologne les Nobles sont les Propriétaires des Biens-fonds, qu’ils sont des Seigneurs absolûs, puisqu’ils ne sont soumis & dependants de qui que ce soit ; ils ne connaissent d’autre Maître que la Loi qu’ils se constituent eux mêmes & qu’ils [7r] n’observent que quand il leur plaît ; en un mot, ils en agissent avec elle avec tant de familiarité comme avec leur Créature.

D : Qui est-ce qui constitue & païe les Impôts ?

R : C’est la Noblesse qui constitue les Impôts & ce sont les Païsans, les Bourgeois, les Juifs & les Prêtres qui les païent ; car coment devrait-Elle se charger d’Impôts elle même ? Si la Noblesse donne quelque chose, c’est sous le nom d’Offran[d]e55 ms. Offrante., car il faut bien enfin faire une distinction entre le Dominateur & le Sujet !

[7v] D : Mais outre ceci, quels sont les autres Prerogatifs de la Noblesse ?

R : La Noblesse possède aussi les Biens-Roïaux, les Biens sujets au Droit de Caduc & les Confisqués ; en un mot le Roi qui règne, doit par l’authorité de Sa Dignité, tout distribuer ; et la Souveraineté de la Noblesse tout s’approprier.

D : Le Roi en Pologne, comment occupe-t-il le Trône de la Nation ?

R : Le Roi Elû par une Election libre, est conçû dans le Sein de la République, sous le Voile de la Liberté de la Noblesse, par la Cooperation de [8r] quelque Puissance Voisine.

D : Que signifie le Roi dans Sa Dignité ?

R : En Pologne le Roi seul forme un Etat complet, quoiqu’en effet il n’est naturellement qu’une Personne.

D : Et dans le Gouvernement de la Nation, que signifie le Roi ?

R : Pendant Son Election, le Roi signifie tout, et après avoir pris les rênes du Gouvernement, il ne signifie plus grand chose.

D : Comment le Roi elû en Pologne signifie-t-il beaucoup pendant Son Eléction ?

[8v] R : Comme la Nation ne veut rien faire pour le bien publi[c]66 ms. publique., Elle assigne donc au Roi de s’engager par les Pacta Conventa de satisfaire à tous les besoins de l’Etat. Or, le Roi signifie donc alors, ce qui devrait être toujours le bût de toute la Nation.

D : Et pourquoi signifie-t-il peu après avoir pris le Gouvernement ?

R : Parceque le grand pouvoir des Seigneurs, qui profitent des dissentions de la moindre Noblesse, ne Lui permet pas de rien faire. Car le Gouvernement Militaire, les Magistratures des Villes, l’inspèction du Trèsor, [9r] la Sûreté même du Monarque, tout enfin est mis entre les mains des Ministres.

[D]77 ms. R. : Qu’est-il donc resté du pouvoir Monarchique ?

R : Rien autre chose que la Convocation de la Diéte, la Dispensation des Charges et la Signature des Privilèges de foires.

D : Par l’authorité & au nom de qui, cite-on aux Jugements ?

R : Au nom du Roi ; excepté les Citations du Grod, où les Starostes en qualité de Lieutenants du Souverain font briller leurs noms.

D : Combien d’espèces de Juges y a-t-il en Pologne ?

R : De deux espèces, sçavoir les Viagers & les Temporels, c’est à dire les Venaux et les Stipendiés.

[9v] D : Quels sont les Juges Viagers ?

R : Ce sont les Starostes de Grods & les Juges Terrestres qui sont Viagers ; pour les Députés ou Juges des Tribunaux & des Commissions, avec leur Titre d’Excellence, ce ne sont que des Juges temporels.

D : Quels sont les Juges mercénaires & quels sont les Stipendiés ?

R : Les Starostes de Grods achettent les Starosties avec le Droit de juger, & ce sont là les Juges mercénaires ; quant aux Juges qui viennent aux Condescendances, ils ne sont pas Venaux, mais Stipendiés, & surtout là où il s’agit de faire des partages ou Répartitions. Pour les Juges des Tribunaux [10r] ils sont d’ordinaire Stipendiés & loués à diverses Conditions.

D : Qu’entendez Vous par diverses Conditions ?

R : Il y a des Deputés, qui dans tous les Procès doivent obeïr & se conformer aux intentions de S : E : M.r NN. mais cela avec tant de ponctualité, comme si il dependait de Lui, ou qu’il serait son Serviteur. Il y a quelque fois d’autres Députés qui ne sont engagés que pour juger & soutenir une seule Cause, & qui après que celle-ci a été jugée, il peut derechef prendre des nouveaux engagements.

D : Quels sont les attribûts particuliers de la Noblesse de Pologne ?

R : Ce sont la Liberté & l’Egalité.

[10v] D : Comment l’Egalité peut-elle par l’authorité de la Loi égaliser les dispositions de la Providence ?

R : Les Nobles de Pologne etant des hommes, il s’en trouve des Riches & des Pauvres, des Sçavants, des Ignorants, des Spirituels & des Stupides, cependant le principal Privilege de leur Constitution consiste en cela que nonobstant tous les Caprices du Sort ils sont pourtant tous égaux, & aussitôt que quelqu’un est Noble en Pologne, l’indigence & la Stupidité ne doit plus lui appartenir, mais cela le rend supérieur à tout ce que la Providence distribue avec modération au reste du Genre humain.

[11r] D : Quand est-ce que cette égalité de la Noblesse brille dans la Nation ?

R : Aux Diétines.

D : Combien de tems l’un est-il égal à l’autre ?

R : À peu près aussi longtems qu’il arrive à un Comédien sur le Théatre d’être Achille, César, Enée, ou quelqu’autre Héros.

D : De quelle façon cela se fait-il ?

R : Cela se fait dans chaque Province differement.

D : De quelle façon l’Egalité des Nobles, existe-t-elle en Grande Pologne ?

R : En Grande Pologne il y a des Nobles qui battants le pavé des Villes, sont des Manants, des Fainéants, des Ivrognes [11v] & très souvent même des Brigands ; à l’approche des Diétines, les Citoïens les plus à leur aise font tourner leurs vieux uniformes et en pârent ces Vauriens ; un chacun d’eux amene sa bande qu’il tâche d’ivrer, les titrant toujours de freres, & voila tout [de] suite88 ms. toute suite. en quoi se montre l’egalité.

D : Et dans la petite Pologne, coment peut-on se montrer égal ?

R : Comme les Seigneurs y ont des Vastes Domaines & des grandes Starosties, où ils ont des Nobles qui leur païent le Loïer, & qui par leur indigence, leur simplicité & leurs travaux ne different en rien de leurs Sujets, c’est à ceux là qu’ils [12r] ordonnent d’aller aux Diétines, comme à la Corvée, & y élir un tel pour Nonce ou Deputé, & que si le parti contraire s’y oppose, qu’ils se battent d’après l’usage contracté dans cette Contrée, à l’occasion des disputes de Frontières. L’on ne néglige pas de donner amplement à boire à cette populace de Nobles, tant de l’Eau de Vie, que de l’hidromel, et de les titrer solemnellement de Messieurs mes frères, en s’egorillant toujours à crier : Vive l’Egalité & la Liberté ! Et dans ceci l’on reconnait de nouveau l’egalité des Nobles, que ce même qui à la persuasion du Kanczuch avait été contraint d’aller faire la Corvée, devient dans un autre moment de nouveau [12v] égal à Son Maitre. L’on peut dire à peu près la même chose du fretin minutieux de la Noblesse du reste des Palatinats de Pologne.

D : Quelle sorte de Commerce y a-t-il en Pologne ?

R : Le Commerce de Pologne est de deux espèces : l’un provenant des Productions Terrestres, nécéssaires aux besoins de la Vie ; l’autre est le Politique derivant de la fantaisie de la Noblesse, & qui n’est propre uniquement qu’à la Nation Polonaise.

D : De combien d’espèces ce Commerce est-il ?

R : De deux espèces, sçavoir le Commerce chez l’Etranger & celui dans le Païs.

D : Quel est le vrai Commerce des Polonais avec l’Etranger ?

[13r] R : C’est la Vente des avis des Cabinets étrangers, aux influences & Conjonctures ; cependant ce Commerce ne se fait que par les Sénateurs, les Ministres & les Dignitaires du Païs ; car la petite Noblesse ne peut être considerée dans ce trafic, que comme des Revendeurs ou des Mercerots99 Les Dictionnaires de l’Académie Française ni les autres dictionnaires anciens ne relèvent pas ce terme ; il est propre au moyen français et signifie « petit marchand ambulant, petit mercier » (cf. Dictionnaire du moyen français – accessible en ligne : http://www.cnrtl.fr/definition/dmf)..

[D]1010 ms. R. : Quel est le Commerce intérieur des Polonais ?

R : C’est la Vente de la Justice, de se louer pour les Diétines, & de débiter les Charges & les Dignités.

D : Quel profit la Vente des Charges & Dignités peut elle procurer ?

[13v] R : Celui qui vend la Charge, prend de l’argent comme si c’etait pour des Marchandises, & c’est ainsi que les Dignités se sont accumulées en Pologne, car nous y voïons des Senateurs, des Ex-Senateurs ; des Dignitaires, des Ex-Dignitaires ; des Starostes, des Ex-Starostes, &c. &c. &c.

D : Mais outre ce trafic, les Polonais n’ont ils pas encore un autre Commerce entre soi ?

R : Ouï, c’est la Cession des Biens aux Créanciers, per Potioritatem.

D : Et cela comment ? car il me semble que quand quelqu’un cède ses Biens, cela doit être suffisant pour païer ses dettes ?

R : C’est bien dit ; puisque c’est ainsi dans [14r] tout l’Univers, hormis en Pologne, où les Seigneurs prodigues, aïant dissipés tout leur Bien, & aïant fait plus de dettes qu’ils ne sont en état de païer, ils cèdent leurs Biens, au double & au triple de ce qu’en effet ils valent.

D : Les Armées de Pologne ont elles été nombreuses jusqu’ici ?

R : Jusqu’à présent, les forces de la Pologne, au lieu d’être nombreuses, etaient de deux espèces, c’est à dire les unes etaient des Trouppes Polonaises, & les autres sur le pié des Trouppes Etrangères.

D : La division des Trouppes Polonaises etait-elle nombreuse ?

[14v] R : Ouï assûrement, car il n’y avait pas de Senateur, de Ministre ou de Dignitaire de la Couronne qui n’ait eû sa Compagnie d’hussard ou de Cuirassier, auxquels ils faisaient porter des Porte-Epées au[x]1111 ms. au. Sabres.

D : Quels etaient les fonctions des Trouppes Polonaises ?

R : La Noblesse de cette Cavalerie était obligée de se rassembler à la Revûe générale de la Commission de Radom, & aux Diétines, pour assister à S : E : le Grand Général, en sa qualité brillante de Dispensateur du Sang des Citoïens.

D : Et les Trouppes sur le pié des Etrangers1212 ms. Etrangères., quelles fonctions avaient elles ?

[15r] R : De monter la Garde à Piotrkow & Lublin, pendant la durée du Tribunal, & de tirer solemnellement pendant les Grands Diners, lorsqu’on bûvait la Santé Prosperitas Reipublicæ !

D : Qui est le Chef des Trouppes de la République ?

R : C’est le Grand-Général.

D : Qu’est-ce que c’est que ce Commandant Suprême ?

R : C’est un Grand-Général d’une très petite Armée, Son Commandement n’étant déja plus formidable devant l’Ennemi, commençait déja à être extrêmement despotique & oppresseur des Citoïens.

[15v] D : En quoi consiste l’authorité du G. Général ?

R : À rompre les Diétes ; à exciter des Soupçons contre les Rois ; à élire Ses Nonces despotiquement aux Diétines ; à pourvoir les Tribunaux de Deputés de Sa Création ; à usurper le bien d’autrui ; en un mot, à troubler les Jugements & Magistratures du Païs, & à être le Médiateur inter Majestatem & Libertatem.

D : Il semble donc que la République, aïant des choses si contraires au bon Sens dans Son Gouvernement, doit être sujette très souvent à des rencontres fâcheuses ?

R : Pour ceci cela n’est que trop certain, mais en même tems conforme à la [16r] forme de Son Gouvernement qui est le contraste de celui des autres Nations.

D : Comment entendez Vous cela ?

R : Observez d’abord que la Pologne est rarement sujette à quelque revers de la Nature ; car les tremblements de terre y sont inconnûs, rarement l’on y voit la Peste, la famine y est bannie, & la Guerre – une chose impossible.

D : Comment la Guerre y est-elle une impossibilité ?

R : Puisque l’on a depouillée la Pologne de la Prusse, d’une partie de la Petite-Pologne & d’un morceau de la Lithuanie, & que tout ceci a pû se faire [16v] sans Guerre, sans verser une goutte de sang, enfin sans décharger un fusil.

D : Quelles sont donc les adversités qui oppriment la République ?

R : Elle a les siennes propres, tout à fait contraires à celles des autres Nations, sçavoir les Interrègnes, les Confédérations, les Elections, les Pacifications & les Amnesties ; par ces formes de Gouvernement la République s’affaiblit & s’extenûe à un tel point que cela lui vaut bien en Vérité toutes les Pestes, tremblements de terre & autres fléaux possibles.

D : Qu’est-ce que c’est que l’Amnestie ?

[17r] R : C’est le point de patience de la Philosophie Stoïcienne, changé en Constitution du Gouvernement de Pologne lorsque la République daigne généreusement pardonner tous les Vols, meurtres, incendies & autres Violences qui ont été comises pendant un Interrègne, témoïgnant par là de la Clemence dans la forme de Son Gouvernement, & de la patience dans les torts & outrages commis envers les Citoïens.

Aveu ou Confession du Gouvernement de Pologne.

Je crois & confesse la Liberté de l’Etat Equèstre de Pologne, Créatrice de tout désordre, [17v] Oppression, dédain & mépris, qui a privé1313 ms. privée. le Païsan du Droit humain, & le Bourgeois du Droit de Citoïen ; qui a fait naitre l’absolutisme des Grands qui excitent l’animosité, la bassesse & la division entre les Nobles qui forment des partis animés par l’atrocité & l’audace des puissants. Je crois en outre, que le Roi est privé de l’authorité convenable à la Majesté, qu’il souffre & avâle innocemment, très frequament des insolents reproches qu’on Lui fait concernant les désastres du Païs ; qui ne sont cependant occasionés que par le susdit absolutisme. Je crois aussi que les Trouppes, le Trésor, la sûreté [18r] des Loix & celle de la Capitale, etant divisé entre quatre Dignités, sont la Cause commune de l’oppression, du pillage, de la persécution & de l’injustice. Je ne crois pas moins non plus dans la Corruption des Senateurs & des Nonces ; je crois à n’en pouvoir point douter à leur Co-intelligence avec les Ministres Etrangers qui ont appris à connaitre leur Caractère & leur avidité. Je crois en la Résurrection d’un Pouvoir étranger pour former notre désastre. Je crois de même au Parjure & Perfidies journalières, & qu’enfin nous aurons un jour un meilleur Gouvernement en Pologne. Ce que Dieu donne, Ainsi soit-il !

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